lundi 7 janvier 2019

ACTE ANORMAL DE GESTION NOUVELLE DÉFINITION

acte anormal de gestion. une nouvelle définition

(CE plénière fiscale 21.12.18 l'aff château de la Croë)



Traditionnellement depuis la plénière fiscale du 27 juillet 1984 N°34588  : «En droit fiscal, l'acte anormal de gestion est un acte ou une opération qui se traduit par une écriture comptable affectant le bénéfice imposable que l'Administration entend écarter comme étrangère ou contraire aux intérêts de l'entreprise». Mais c’est au regard du seul intérêt propre de l'entreprise que l'administration doit apprécier si les opérations litigieuses correspondent à des actes relevant d'une gestion commerciale  acte qui peuvent avoir été effectués avec une contrepartie ((CE 26 septembre 2001, n° 219825  
Le conseil semble avoir élargi cette définition dans la plénière du 21.12.2018
"Constitue un acte anormal de gestion l'acte par lequel
 une entreprise décide de s'appauvrir à des fins étrangères à son intérêt."
les  exceptionnelles conclusions de Mme Aurélie Bretonneau, rapporteur public
ne sont malheureusement  pas libres du moins pour l instant ??
la société Croë Suisse, résidente fiscale suisse, a cédé  le 1er janvier 2006 à M. Abramovitch ., résident fiscal russe, la totalité des actions de la société  Croë France, dont le siège est en France et dont l'actif est principalement constitué du château de la Croë, situé à Antibes (Alpes-Maritimes). La plus-value réalisée à cette occasion a été soumise à l'impôt sur les sociétés, après déduction du prélèvement déjà acquitté en vertu des dispositions de l'article 244 bis A du code général des impôts.
A l'issue d'un contrôle sur pièces, l'administration fiscale a remis en cause, sur le fondement de l acte anormal de gestion la valeur des actions cédées et réintégré dans le résultat imposable de la requérante l'écart entre le prix de cession des actions (6.000000 € )et la valeur vénale qu'elle a déterminée à 46 410 669 euros.
Pour la CAA , l’administration était fondée à évaluer  ,au 1er janvier 2006,  l’actif de la société Croë France à 98 907 441 euros et, compte tenu de son passif, à fixer la valeur des titres cédés à 46 410 669 euros ;et qu’il existe un écart significatif entre cette valeur et le prix de cession des titres, qui était de 6 000 000 euros ;et
"
l’administration apporte la preuve, qui lui incombe, de ce que la SOCIETE CROË SUISSE, en acceptant de céder à M. C...les titres qu’elle détenait dans la société Croë France au prix de 6 000 000 euros, a commis un acte anormal de gestion à concurrence du montant de l’insuffisance de prix, soit 40 410 669 euros" ;
L'administration a, par ailleurs, mis à la charge de la société requérante des retenues à la source sur les sommes regardées par elle comme distribuées, d'une part, à l'associé unique de la société et, d'autre part, à M.B...
Par un arrêt n°s 14VE00248, 14VE00347 du 29 mars 2016, la cour administrative d’appel de Versailles, sur appels formés par le ministre des finances et des comptes publics et par la société Croë Suisse, a réformé le jugement du TA de Montreuil du 20 septembre 2013 , d’une part, en remettant à la charge de la société l’ensemble des cotisations supplémentaires d’impôt sur les sociétés, de contribution sociale sur cet impôt en litige, ainsi que des majorations correspondantes, et, d’autre part, en déchargeant la société de la retenue à la source à laquelle elle a été assujettie sur le fondement de l’article 115 quinquies du code général des impôts, de la retenue à la source appliquée aux revenus distribués au sens du c de l’article 111 du même code, ainsi que des pénalités correspondantes, et a rejeté le surplus des requêtes.
Par un pourvoi, la société Croë Suisse demande au Conseil d’État d’annuler cet arrêt en tant qu’il n’a pas fait intégralement droit à son appel.
Question justifiant l’examen de l’affaire par la formation de Plénière fiscale :
Le fait, pour une entreprise, de céder l'un de ses actifs à un prix manifestement inférieur à sa valeur vénale est-il de nature à faire présumer un acte anormal de gestion
Le conseil d état annule l arrêt  et renvoie devant la CAA
 Pour qualifier la cession  d'acte anormal de gestion, la cour de Versailles  a d'abord considéré que l'administration était fondée à évaluer la valeur vénale des titres cédés à 46 410 669 euros . En jugeant, pour confirmer ainsi l'évaluation de l'administration, qu'il n'y avait pas lieu de tenir compte de l'illiquidité des titres cédés au seul motif que " la cession a porté sur la totalité des titres de la société Croë France dont l'unique actif est, avec le terrain qui lui est associé, le château de la Croë, qu'elle gère sans l'exploiter ", la cour a commis une erreur de droit.  
S'agissant de la cession d'un élément d'actif immobilisé, lorsque l'administration, qui n'a pas à se prononcer sur l'opportunité des choix de gestion opérés par une entreprise, soutient que la cession a été réalisée à un prix significativement inférieur à la valeur vénale qu'elle a retenue et que le contribuable n'apporte aucun élément de nature à remettre en cause cette évaluation, elle doit être regardée comme apportant la preuve du caractère anormal de l'acte de cession si le contribuable ne justifie pas que l'appauvrissement qui en est résulté a été décidé dans l'intérêt de l'entreprise, soit que celle-ci se soit trouvée dans la nécessité de procéder à la cession à un tel prix, soit qu'elle en ait tiré une contrepartie.
 En vertu des dispositions combinées des articles 38 et 209 du code général des impôts (CGI), le bénéfice imposable à l'impôt sur les sociétés est celui qui provient des opérations de toute nature faites par l'entreprise, à l'exception de celles qui, en raison de leur objet ou de leurs modalités, sont étrangères à une gestion normale.
"Constitue un acte anormal de gestion
l'acte par lequel une entreprise décide de s'appauvrir à des fins étrangères à son intérêt. "